Une inondation est le débordement des limites normales d’un ruisseau ou d’un autre plan d’eau, ou l’accumulation d’eau sur des zones qui ne sont normalement pas submergées. Une inondation se produit typiquement au niveau local ou des bassins hydrographiques. Il y en a plusieurs types y compris fluviales, urbaines, éclairs et côtières (voir la FAQ 6.1 et, pour les inondations côtières, le chapitre 7, section 7.5.3; Seneviratne et coll., 2012). Cette section n’évalue que les inondations liées aux écoulements fluviaux, bien que les implications pour les inondations urbaines soient discutées. Les principales causes des inondations fluviales sont les précipitations intenses et/ou de longue durée, la fonte des neiges/glaces, la pluie sur neige, les embâcles la rivière ou une combinaison de ces causes. Le risque d’inondation est également touché par les conditions du bassin hydrographique, comme les niveaux d’eau préinondation dans les rivières; la présence de neige et de glace; le caractère du sol (p. ex. qu’il soit congelé, sa teneur en eau); l’urbanisation et l’existence de digues, de barrages et de réservoirs (p. ex. Bates et coll., 2008).
Les inondations fluviales sont un phénomène courant et naturel, mais les grands événements représentent souvent une catastrophe coûteuse pour les Canadiens (Buttle et coll., 2016; Peters et coll., 2016). Compte tenu de l’éventail des facteurs potentiels, les inondations peuvent survenir à n’importe quel moment de l’année, quelque part au Canada. Les inondations découlant de la fonte des neiges et des embâcles ont généralement lieu pendant le printemps, mais peuvent aussi être causées par des fontes mi-hivernales. Les inondations générées par des précipitations intenses et/ou excessives se produisent généralement à la fin du printemps et à l’été, lorsque les précipitations de convection atmosphériques (généralement brèves, mais intenses averses résultant de la convection de la chaleur formant des cumulonimbus) sont plus fréquentes. L’inondation du Sud de l’Alberta, en juin 2013, a été un exemple d’un événement coûteux, qui a été principalement entraîné par des pluies extrêmes (y compris des pluies sur neige à des altitudes plus élevées) associées à un système météorologique intense (Liu et coll., 2016; Teufel et coll., 2017) (voir le chapitre 4, section 4.4.1.1). En revanche, les embâcles sur les rivières Lower Peace et Athabasca dans le Nord de l’Alberta en 2014 ont entraîné une inondation généralisée des zones humides du delta, ce qui a été bénéfique pour le maintien de l’écosystème aquatique dans la région (Peters et coll., 2016). En 2014, un début tardif de la fonte des neiges et les pluies abondantes de mai et de juin ont entraîné des inondations majeures dans le Sud-Est des Prairies du Canada (Szeto et coll., 2015).
Les différentes régions du Canada sont classées selon le type d’inondation qu’elles connaissent généralement. Dans l’ensemble du pays, 32 % des 136 sites de jauge de courant (1913-2006) sont classés comme étant dominés par des crues printanières/de débâcle de glace, 42 % comme étant dominés par des crues d’eau libre (c.-à-d. pendant la saison chaude) et 23 % comme étant un mélange de ces deux classes. Le moment où les niveaux d’eau de pointe influencés par la glace et la débâcle de la glace (qui peuvent entraîner des inondations) se produit plus tôt depuis la fin des années 1960 (von de Wall et coll., 2009; 2010) (voir aussi le chapitre 5, section 5.5). Il y a aussi des régions du Canada, comme la rivière Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, où les plaines inondables ont été soumises à des embâcles plus fréquents en milieu d’hiver et à des écoulements d’avril plus élevés, qui augmentent tous deux le risque d’inondation majeure (Beltaos, 2002). Cependant, des analyses plus récentes des rivières au Canada dominées par des crues de printemps et des inondations d’eau libre a révélé que les changements dans l’ampleur, le rythme, le nombre et la durée des événements à écoulement élevé montraient des tendances variables à travers le Canada, augmentant dans certains cas et diminuant dans d’autres. Dans le cas des bassins nivaux, il s’agissait de tendances pour des inondations moins importantes et plus précoces; ce qui est en accord avec une réduction de l’accumulation de neige (Burn et Whitfield, 2016). En outre, l’examen du caractère saisonnier des régimes d’inondation précédents dans 132 stations du RHR sur quatre périodes allant de 50 à 80 ans a révélé la diminution de l’importance des inondations à la fonte des neiges et l’importance accrue des inondations provoquées par les pluies sur neige et la fonte des neiges (Burn et coll., 2016). À la connaissance des auteurs, aucune étude n’a évalué les tendances passées des inondations urbaines au Canada.
Les interactions complexes entre les nombreux facteurs qui mènent à des inondations fluviales compliquent l’attribution de ces événements aux changements climatiques anthropiques. Une étude d’attribution des inondations du Sud de l’Alberta en 2013 a déterminé que le réchauffement induit par l’influence humaine a augmenté la probabilité de précipitations extrêmes, au moins aussi importantes que la quantité observée pendant cet événement (Teuful et coll., 2017). Toutefois, puisque l’inondation a résulté d’une combinaison de nombreux facteurs météorologiques et hydrologiques, l’influence humaine n’a pas pu être détectée pour l’inondation elle-même (voir le chapitre 4, section 4.4.1.1). De même, une étude d’attribution des inondations de 2014 dans le Sud-Est des Prairies a été incapable de détecter l’influence humaine sur cette inondation, en raison de multiples facteurs contributifs (Szeto et coll., 2015).
On s’attend à ce que les changements climatiques aient un effet sur plusieurs facteurs influant sur l’occurrence future d’inondations fluviales (voir la FAQ 6.1). Ceux-ci comprennent la quantité, le type et l’intensité des précipitations; la quantité et la durée de la couverture de neige; le moment et la fréquence des embâcles; et le potentiel pour les événements de pluie sur neige. Cependant, les interactions entre les facteurs générateurs d’inondations à l’échelle des bassins hydrographiques entraînent de grandes incertitudes quant à la fréquence et à l’intensité des inondations futures (Whitfield, 2012). Certaines études ont suggéré que la contribution de la fonte des neiges aux inondations printanières devrait généralement diminuer en raison de l’épuisement des accumulations (p. ex. Whitfield et Cannon, 2000; Zhang et coll., 2001; Peters et coll. 2006). Toutefois, il n’y a que quelques études à l’échelle des bassins hydrographiques sur les inondations fluviales futures (et/ou leurs facteurs connexes) au Canada, qui utilisent les projections du modèle climatique comme intrants dans un modèle hydrologique. Par exemple, on prévoit que l’épuisement du manteau neigeux lors d’événements de fonte à la mi-hiver entraînera une réduction importante de la fréquence des inondations printanières provoquées par des embâcles, mais pourrait accroître le risque d’inondations provoquées par des embâcles du milieu de l’hiver dans le delta Peace-Athabasca dans le Nord de l’Alberta (Beltaos et coll. 2006). Il est prévu que deux bassins hydrographiques de la Colombie-Britannique, l’un sur la côte et l’autre à l’intérieur, connaissent un potentiel accru d’inondation en raison d’une augmentation des pluies et des événements de pluies sur neige dans le bassin hydrographique côtier et d’une augmentation des pluies printanières et de l’accélération des événements de fonte des neiges dans le bassin intérieur (Loukas et coll., 2000; 2002). Pour le bassin de la rivière Rouge au Manitoba, l’accumulation de neige pendant l’hiver devrait diminuer, tandis que les pluies devraient augmenter pendant la période de fonte. Toutefois, en raison de la variabilité entre les modèles climatiques, il est difficile de déterminer si l’ampleur des inondations augmentera ou diminuera (Rasmussen, 2015). Dans le bassin hydrographique de la rivière Châteauguay au Québec, les crues de pointe du printemps, de l’été et de l’automne devraient perdre d’ampleur dans un scénario d’émissions moyennes (B2), mais il existe de grandes différences entre les trois modèles utilisés (Mareuil et coll., 2007). La seule étude des changements projetés dans les événements de pluie sur neige a suggéré des augmentations générales de ces événements de novembre à mars pour la majeure partie du Canada d’ici le milieu du siècle (2041-2070) pour les scénarios d’émissions de moyennes (RCP4.5) et élevées (RCP8.5) (Jeong et Sushama, 2018). À la connaissance des auteurs, aucune étude n’a évalué les changements projetés aux inondations urbaines au Canada. Toutefois, les augmentations des précipitations extrêmes sont considérées comme un facteur qui influera sur leur apparition future (p. ex. Buttle et coll., 2016; Sandink, 2016).